Chapitre 1

 Le Worcestershire Road

C'est au cours de son séjour de vacances en Égypte, à l'aube du septième matin, que Watson, notre fin limier, décida de quitter sa spacieuse chambre de l'hôtel Excelsior pour en avoir le cœur net avec ces histoires de pharaons. Ces princes d’Égypte l'avaient intrigué depuis sa plus tendre enfance, ce qui n'est pas peu dire, car après avoir lu tous les Tintin, Garfield et Astérix, il revenait inexorablement à ces grands fanfarons qui le fascinaient au plus haut point. Même Boule et Bill n'avaient pas cet effet sur lui.

En ce matin de juillet, c'est l'occasion idéale, se dit-il, de faire un peu de lèche-vitrines dans les grottes d’Aménophis. Partagé entre le désir de rester blotti dans les bras de sa douce, et son légendaire instinct de fureteur, il décida d'aller investiguer les grottes du tombeau de Toutankhamon en attendant le réveil de sa plantureuse Claudia. Il se souvenait que, lors de la préparation de son voyage, l'agente de voyage lui avait parlé de la mystérieuse porte secrète située sous la queue du sphinx et d'ailleurs, son confrère Sherlock en était resté bouche-bée puisqu'il ignorait totalement que le sphinx eût une queue.

Avide de faire sa petite enquête et n'écoutant que son courage, il jeta un dernier regard langoureux sur sa gracieuse Claudia étendue dans le lit à baldaquin drapée dans ses draps de satin grenât qui lui allaient à ravir. Guidé par son flair, il se glissa silencieusement dans le spacieux corridor de l'hôtel cinq étoiles.

Les rues étaient désertes et la journée s'annonçait plutôt torride mais quand même pas aussi torride que la nuit qu'il venait de passer avec son époustouflante Claudia, mais bon, passons puisque ce n'est pas le sujet. Perdu dans ses pensées il traversa la place du marché et, ne suivant que son instinct, arriva dans une petite rue qui menait directement entre les deux pattes du sphinx. Intrigué, il contourna le rocailleux félin pour vérifier s'il avait bien une porte d'entrée sous l'embouchure. Pour un œil averti, il n'y avait pas de doute, le sphinx avait effectivement une queue entourée de bosquets verdoyants qui dissimulaient une entrée menant au cœur du bel animal.

Après une heure de tâtonnement dans l'obscurité de la grotte, c'est à travers les stalactites et les stalagmites qu'il découvrit, à sa grande stupéfaction, un tombeau ouvert! Fait encore plus troublant, il était sur roulettes!! Excité au plus haut point, il roula à tombeau ouvert jusqu'à l'extérieur pour évaluer sa découverte et commença la fouille minutieuse. Surpris, il songea qu'il aurait une énigme de taille à résoudre et qu'il aurait sans aucun doute besoin de l'aide de son ami Sherlock. On devinait un sourire sous sa mine ébahie. C'est Sherlock qui va être surpris, songea-t-il. Il voyait d'ici le flegmatique Sherlock complètement décontenancé devant cette inimaginable affaire à résoudre.

Loin de s'imaginer que ses quelques jours de vacances prendraient une telle tournure, il décida sans plus attendre de rentrer à Londres pour faire part à son collègue de cette mystérieuse découverte.

De retour à Londres, retrouvons donc nos deux héros installés au salon de la maison de Sherlock dans le quartier de Worcestershire, sirotant un bon thé et discutant de choses et d'autres comme ils savent si bien le faire.

Sherlock: Une âme cent pour cent végétale cher ami et qui plus est, poly-insaturée et non-hydrogénée.

Watson: Ah! fit-il d'un air songeur.

Sherlock: J'ai assisté à des conférences avec, entre autres, le grand pédologue Santerre Sapousse.

Watson: Ah ! fit-il d'un air intrigué.

Sherlock: Saviez-vous, cher ami, que je possède présentement un spécimen rare dans mon sauna-taurium ?

Watson: Ah! fit-il d'un air interrogateur.

Sherlock: En effet, imaginez-vous donc qu'il m'a affirmé avec preuve à l'appui que mon phylodendron secundis serait la réincarnation de ma première femme Hortensia.

Watson: Ah! fit-il encore d'un air douteux.

Sherlock: Voulez-vous cesser de changer d'air s'il vous plaît !!!

Watson: Euh...fit-il d'un air déconcerté. Excusez-moi, j'avais la tête ailleurs.

Sherlock: Dans les monts de Claudia peut-être ?

Watson: Excusez-moi encore. Poursuivez, je reviendrai sur ce qui me tracasse plus tard.

Sherlock: Je disais donc, que ma première femme Hortensia, serait la réincarnation de mon phylodendron secundis. Je soupçonnais qu'elle avait une âme végétale mais comme elle mangeait beaucoup de gras animal et de fameux Mcmuffins de Sir McDonald, vous savez comme moi que c'est le cholestérol qui l'a tuée et non Jack l'éventreur comme nous le pensions à l'époque, si vous vous rappelez bien de notre enquête, cher collègue. Vous savez, Santerre est passé maître dans l'art de communiquer avec les plantes grasses et il m'affirme que mon Hortensia était du type végétal déshydro-gênée. En effet, elle était très timide et elle renonculait souvent devant mes avances pédonculantes.

Watson: Ah ! fit-il sans air particulier.

Sherlock: Cependant, mes soupçons se confirment car j'ai retrouvé quelques photos d'elle se plantant le nez dans un Amadévis Tulanuscrum, plante pulpeuse d'odeur suave communément appelée le Lys Saint-Jacques. Elle vient d'une famille de monocotylédone de souche Sicilienne, car cotylédonne quetchose on né pé pas réfousé. Je vais la mettre sous verre et la surveiller de près.

Watson: Que de questionnement, que de questionnement ! Mais étant moi-même un beau-tanniste à mes heures, je pourrais vous en parler longuement. Malgré que, selon mon expertise, certaines questions restent floues en ce domaine.

Sherlock: Ah oui, lesquelles ?

Watson: Lorsqu'un être humain est possédé d'une âme végétale, où pistil? Et s'il s'avérait avoir une âme mécanique, la question serait-elle où piston? Y a de quoi changer de domaine et se recycler en pisciculture et devenir piscivore, puis mouiller son pyjama la nuit et se faire passer pour un pissenlit et, par le fait même, tacher son drap de pistache. Enfin, restons sur cette piste car c'est pissement plus drôle un pisse-vinaigre à la pointe d'un pistolet qu'une pissoire à la pointe d'un pisse-minute.


Sherlock: Croyez-vous cher Watson, que je devrais lui couper la queue pour accélérer le processus de réincarnation sous le règne minéral, car je voudrais m'installer une racaille à l'arrivée du printemps ?

Watson: Pas du tout cher ami, le processus se fera naturellement et, de plus, nous sommes loin d'une pénurie de racaille. Regardez autour de vous, on ne peut pas dire qu'ils sont rares.

Sherlock: J'avais remarqué oui !

Watson: Mais parlant de queue, j'ai fait une découverte qui m'a ébranlé au plus haut point.

Sherlock: Ah ! c'est cela qui vous tracasse depuis votre arrivée. Auriez-vous perdu toute sensibilité à ce niveau ? D'ailleurs, je comprendrais vu votre âge avancé.

Watson: Mais pas du tout !!! Je vous ferai remarquer que ma queue se porte très bien merci, quelques petits furoncles ici et là mais sans plus, alors puis-je continuer mon histoire ?

Sherlock: Oui bien sûr, répondit-il, arborant un sourire de satisfaction.

Watson: Vous vous souvenez sans doute de l'agente de voyage qui avait préparé mon séjour de vacances en Egypte, vous savez, la jolie rousse?

Sherlock: Ah oui! je me souviens, celle qui ressemblait à Sandra Botox?

Watson: Euh... oui, si on veut. Eh bien, elle avait raison! Le sphynx a une queue qui cache une porte secrète et je l'ai vue de mes yeux!

Sherlock: Ah Seigneur! J'aurai tout entendu! Mais comment se fait-il que personne n'en ait jamais parlé si ce que vous dites est vrai?

Watson: J'ai fait ma petite enquête, vous pensez bien! Le guide touristique m'a affirmé que toute la partie arrière du sphynx était enfouie sous un amoncellement de sable depuis des milliers d'années et soudain, l'an dernier, secoué par un énorme tremblement de terre, tout son arrière-train a resurgi des profondeurs avec un vacarme infernal. Il paraît que c'était quelque chose à voir et à sentir. Voilà ce qui explique pourquoi maintenant, on peut voir sa queue, perdue dans la végétation qui a poussé tout autour.

Sherlock: Quelle histoire, cher ami, je n'en reviens tout simplement pas. Voulez-vous encore un peu de thé?

Watson: Oui, merci, mais ajoutez-y un peu de cognac car j'arrive au plus intéressant cher collègue. Vous vous doutez bien que je n'en suis pas resté là. J'ai sécurisé le périmètre et je me suis mis à avancer à pas de loup vers l'orifice qui se trouvait directement sous la queue et, tenez vous bien cher ami, c'est à ce moment-là qu'une odeur nauséabonde a envahi l'embouchure, juste au bon endroit quoi! J'avais cru voir une momie en putréfaction mais je me rendis compte que cette odeur venait de l'haleine d'Aninus Chinoulta, le gardien du tombeau qui se cachait derrière une toile d'araignée. À voir son allure, on aurait juré qu'il se tenait là depuis un millier d'années et je n'ai pas besoin de vous dire qu'il fût très surpris de ce face-à-face. Il a prononcé quelques mots en sanscrit et sans ce cri j'aurais pu croire qu'il s'agissait d'une statue égyptienne d'un autre temps.

Sherlock: Osiris !

Watson: Ozzy quoi ?!?

Sherlock: Osiris, Dieu égyptien, protecteur des morts, c'est de cette statue dont vous parlez.

Watson: Ah ! Ozzy Rice !

Sherlock: Pas Ozzy comme Ozzy Osborne et Rice comme William Rice, mais Osiris tout court.

Watson: Ah ! Osiris Thout Kûr !

Sherlock: Pas Osiris Thout Kûr cher Watson, mais Osiris tout court.

Watson: C'est ce que je disais, Osiris Thout Kûr !

Sherlock: Noooooon Watson !!! tout court comme la fin!

Watson: La fin de qui ?

Sherlock: Mais la fin de personne merde ! Quel idiot quand même !

Watson: Qui ? Osiris Thout Kûr ?

Sherlock: Laissez tomber !

Watson: Tomber quoi ?

Sherlock: Laissez tomber tout court !

Watson: Ah non, pas encore lui !

Sherlock: C'est à croire que... j'vous dis que, parfois... euh... c'est à se demander si votre appartement du haut est occupé par quelque intelligence aussi minime soit-elle.

Watson: Il est vacant ?

Sherlock: Continuez votre histoire Watson, continuez votre histoire, ajouta-t-il découragé.

Sur cette décourageante discussion, Marguerite, la bonne, entra au salon pour annoncer l'arrivée d'un nouvel invité.

Marguerite: Monsieur Holmes ?

Sherlock: Oui Marguerite ?

Marguerite: Monsieur Vladi Palbonvant désire vous voir !

Sherlock: Faites entrer chère amie !

Tout en s'approchant de la porte pour accueillir son invité, Sherlock se tourna vers Watson et chuchota ces quelques mots à son oreille.

Sherlock: Éminent chercheur, archéologue et agent double Youconslav qui découvrit en dix-huit-cent-quatre-vingt-douze les statues des Dieux grecs, Zeus, Cronos, Rhéa, Namor, Dionisos, Sémélé, Ouranos et Gaïa enfouies dans le sable du Sahara tout près d'Oasis Island. Ses recherches se sont poursuivies jusqu'en mille-neuf-cent-deux pour se terminer en mille-neuf-cent-cinquante-cinq sur les bords du Nil où il fit l'étonnante découverte d'une pièce de monnaie à l'effigie de Babar l'éléphant, nous qui croyions que ce personnage avait été créé pour une série télévisée destinée aux enfants, il n'en était rien, Babar était un Dieu égyptien, représentant le poids de la stabilité dans le commerce. Voyez-vous, les égyptiens étaient comme les gaulois et les romains, si on peut dire, ils avaient des Dieux pour toutes les occasions et cette découverte fût importante pour lui et pour son pays, car avec son statut de double identité, on doutait de sa personne.

Watson: Ah! mais je ne savais pas que Namor était un Dieu grec ?!?

Sherlock sursauta sur cette exclam-interrogation.

Sherlock: Vous doutez de moi et de mes connaissances ?

Watson: Non, mais Namor me semble étranger à cette liste de Dieux grecs que vous m'avez énumérée.

Sur ce, Vladi entra dans le salon, les deux bras tendus vers notre célèbre détective en guise de joyeuses retrouvailles.

Vladi: Bonjour messieurs !

Sherlock: Bonjour mon cher agent Vlad, comment allez-vous ? Venez que je vous présente mon collègue et fidèle ami le docteur Watson.

Vladi: Très honoré cher Docteur. Depuis le temps que j'entends des louanges à votre sujet. J'ai suivi avec grand intérêt, dans le journal, votre enquête sur la disparition du Dr Hérold Vochtenfrozen BurgerinBaken, cet illustre généticien qui avait été enlevé par le KGB.

Watson: Ah oui! je me souviens que le journal La Pravda avait publié des articles sur mes exploits, ceci dit en toute humilité. Mais quel bon vent vous amène Dr Palbonvant?

Vladi: Comme vous le savez sans doute, je suis en relation étroite avec le consulat de Turquie et je viens vous voir sur l'ordre exprès du Consul Yarach Lémur lui-même en personne car, imaginez-vous donc, mes chers amis, qu'il m'a signalé, pas plus tard qu'hier soir, la très suspecte disparition du précieux tombeau qu'on appelle communément le tombeau d'Aseybodygorgeous qui, en fait, est le tombeau contenant le corps d'Âmenmoitasus la fille du grand pharaon Ypetdinphrèse de la dynastie d'Amènaufils. Je ne sais pas si vous voyez l'ampleur de la situation mais cette catastrophe risque d'anéantir tout espoir de pourparlers entre la Turquie et la Papousie Orientale, si vous voyez ce que j'veux dire.

Sherlock: Ah mon Dieu!...mais quelle catastrophe en effet!

Watson: Alors cher Bonvant, j'imagine que vous êtes ici pour solliciter nos services afin de résoudre cette mystérieuse affaire?

Vladi: Exactement! J'ai pensé que vous étiez les deux seuls détectives qui pourraient élucider cette affaire en toute discrétion pour éviter que cette histoire tourne en catastrophe mondiale car, je dois vous mettre en garde dès maintenant que nos ennemis nous surveillent à la loupe et toute tentative de votre part pour résoudre cette énigme risque de vous coûter la vie.

Sherlock: C'est passionnant ! Nous acceptons de vous aider. Watson, nous partons dès demain matin pour l'Espagne.

Watson: Je vais de ce pas préparer mes valises.

Watson fit un signe de la tête en guise d'au revoir et sortit aussitôt de la pièce, laissant ainsi Vladi et Sherlock poursuivre leur conversation.

Vladi: Mais pourquoi l'Espagne ?

Sherlock: Parce que Sergio Délonvalès est en Espagne et ce bonhomme est le pire fouineur que l'Europe ait connu. Chanteur hors pair dans tous les sens du mot et aussi celui qui connaît tout le monde. Alors il sera d'une aide très précieuse pour nous.

Vladi: Parfait ! Je vous laisse débuter votre enquête et j'attendrai de vos nouvelles avec impatience. Et, bien entendu, je reste à votre entière disposition si vous avez besoin de détails croustillants pour étayer le dossier.

Sherlock: Excellent ! alors au revoir cher ami !

Vladi: Au revoir !

Aucun commentaire:

Publier un commentaire